Rue Nungesser et Coli
La rue Nungesser et Coli dans le quartier de La Genette est un hommage à deux grands hommes qui, à bord de L’Oiseau blanc, ont fait le pari fou d’être les premiers à faire la traversée de l’Atlantique sans escale. On vous raconte !
Un défi passionnant
Nungesser et Coli décollent du Bourget à l’aube du 8 mai 1927, sur un biplan Levasseur, baptisé “L’Oiseau blanc” en souvenir d’un chef indien du Wyoming que Nungesser rencontre quelques années auparavent. L’avion est doté d’un moteur Lorraine-Dietrich de 450 CV et de réservoirs pouvant contenir jusqu’à 3 800 litres de carburant permettant quarante heures d’autonomie.
Aucun poids inutile n’est envisageable alors, ils partent ainsi sans radio, ni canot de sauvetage. L’équipement du tableau de bord est des plus sommaire. Et particulièrement en ce qui concerne le contrôle du vol sans visibilité. Toujours dans un souci d’économiser du poids et de gagner en aérodynamisme, le train d’atterrissage est conçu pour être largué après le décollage. L’arrivée est prévue à New York et un amerrissage doit s’opérer devant la statue de la Liberté. Le fuselage étanche permet de flotter en rade de New York pour se diriger ensuite jusqu’à une grue à quai.
On les signale au-dessus d’Étretat en Normandie, puis de la Manche, puis de l’Angleterre et de l’Irlande. Ensuite ils sont seuls au-dessus de l’Atlantique nord. Le vent d’Est est favorable et pousse l’avion vers l’Amérique.
Leur défi en passionne plus d’un des deux côtés de l’Atlantique. Il fait fait la une des journaux. La couverture médiatique de l’événement tient à la personnalité des deux hommes et à l’importance de l’enjeu. Charles Nungesser est un As de la Grande Guerre avec pas moins de 43 victoires à son actif. Il a été blessé et a plusieurs reprises et a même frôlé la mort. François Coli est un pilote de guerre issu de la marine marchande. Il est décoré de la Légion d’honneur, a réussi dès 1919 la double traversée de la Méditerranée.
Le 10 mai, La Presse, le quotidien parisien du soir annonce leur arrivée à New York. Il titre : “Les heures d’or de l’aviation française, Nungesser et Coli ont réussi”, avec pour sous-titre très précis : “A cinq heures, arrivée à New York” …
Quelques heures plus tard, les journalistes apprennent que L’Oiseau blanc n’est pas au rendez-vous. L’avion a disparu. Cette fatale annonce provoque la colère des lecteurs et mène à la faillite du journal, l’un des premiers quotidiens populaires français, dont la création date de 1836.
A la recherche de L’Oiseau blanc
Au cours des années, plusieurs enquêtes et investigations sont entreprises afin de percer à jour le mystère de la disparition de Nungesser et Coli. L’analyse des conditions météo la nuit suivante de leur décollage laisse penser que l’avion a contourné le mauvais temps par le nord. Il a ainsi mis le cap sur les phares du détroit de Belle-Isle, à l’embouchure du Saint-Laurent.
Dans les années 1930, on retrouve dans l’État du Maine des débris et un moteur d’avion du même modèle que celui de L’Oiseau blanc. Certains concluent que les deux pilotes ont tout de même réussi leur traversée.
Toutefois, les enquêtes plus récentes effectuées dans les années 1980 permettent de supposer que l’Oiseau blanc a bien atteint Terre-Neuve et que l’avion se serait écrasé sur cette île ou vers Saint-Pierre-et-Miquelon.
Des témoignages recueillis récemment valident l’hypothèse selon laquelle Nungesser et Coli, détournés de leur itinéraire vers New York, auraient été victimes de trafics liés à la prohibition, avant de disparaître entre Terre-Neuve et Saint-Pierre. En plusieurs années d’enquête, Bernard Decré, un passionné d’aéronautique, créateur de l’association La Recherche de l’oiseau blanc, découvre qu’une dizaine de témoins ont vu ou entendu un avion au sud de Terre-Neuve le 9 mai 1927. Depuis 2007, des recherches se poursuivent sur le terrain et dans les archives.
En ce printemps 1927, la prohibition est plus qu’active. Les eaux de frontières avec les États-Unis sont plus que fréquentées par les trafiquants qui font la navette entre Saint-Pierre-et-Miquelon et la rive du Saint-Laurent. La contrebande dispose de bateaux propulsés par des moteurs puissants, dont certains sont armés de mitrailleuses. L’archipel est en fait un énorme entrepôt de vins et de spiritueux. La mafia contrôle cette activité. Al Capone rend régulièrement visite aux dirigeants de la chambre de commerce. À l’époque, le “parrain” réside à l’hôtel Robert, l’un des plus anciens hôtels de Saint-Pierre. Il conserve d’ailleurs le canotier offert par le truand. Le témoignage d’un mousse basque, relatant le passage d’un avion le long de Terre-Neuve, a été retrouvé par Marcel Jullian, l’ancien président d’Antenne 2 aujourd’hui disparu et passionné par l’histoire des pionniers de l’aviation. Ce témoignage s’appuie sur l’interview d’un commandant de trois-mâts basé à Granville. Il y explique pourquoi ce jeune marin est resté longtemps silencieux : par peur pour sa vie, car son bateau transportait de l’alcool.
Dans la brume, Nungesser et Coli ont-ils découvert ce navire et tourné autour pour se signaler ? L’avion n’a pas embarqué d’émetteur radio, trop lourd. Or, les pilotes veulent amerrir près d’un port. Ont-ils survolé un autre trafiquant qui aurait eu la gâchette facile. L’Oiseau blanc, victime des gangs florissants de la prohibition, pourrait reposer à proximité de cette côte française par faible profondeur.
Une nouvelle étape est franchie dans l’enquête en 2012 avec la découverte dans les archives de l’US Coast Guard à Washington. Ainsi, un télégramme qui date d’août 1927 fait état de une découverte. Celle de deux ailes d’avion blanches, posées l’une sur l’autre et reliées entre elles. Et ce, au large de Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette description est tout à fait fidèle à celle du biplan l’Oiseau blanc. Dans ce télégramme, le garde-côte et capitaine Rasmussen pose la question : “Est-ce que ce ne serait pas l’avion de Nungesser et Coli ?”
Les premiers à vaincre l’Atlantique ?
Encore, plus de quatre-vingt-six ans après leur disparition, les recherches n’ont pas cessées. Un hommage remarquable est d’ailleurs fait aux aviateurs français.
C’est en mai 2013, qu’Erik et August Lindbergh, petit-fils et arrière-petit-fils du pilote du Spirit of Saint Louis, lancent une couronne de fleurs à la mer en mémoire des aviateurs français disparus corps et biens dans leur tentative. Cette cérémonie officielle en leur honneur a lieu tout près de leur supposé crash, au large de l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Erik Lindbergh,qui suit attentivement les recherches depuis quatre ans, répond à l’invitation de l’association La Recherche de l’Oiseau blanc. C’est ke groupe aéronautique Safran qui finance la campagne de recherches. “C’est un premier pas vers la réhabilitation. On va prouver que Nungesser et Coli ont été les premiers à vaincre l’Atlantique sans pour autant dévaluer l’épopée de Lindbergh”, promet Bernard Decré.
Un jour peut-être …
Sources :
Herodote.net
Le Figaro.fr,
AFP
Le Parisien.fr,
La Croix.com.
Le Point.fr
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